Le voyage responsable

Le voyage responsable : un défi pour les fournisseurs, une nécessité pour les entreprises

Marché de niche il y a deux décennies, le voyage responsable s’impose aujourd’hui comme la seule alternative à un tourisme de masse dévastateur pour la planète et trop souvent à double tranchant pour les populations locales. Il ne s’agit pas de faire disparaître le voyage, mais de l’envisager autrement.

Déjà tendance ces dernières années, le voyage durable gagne les entreprises qui doivent inscrire leurs déplacements dans une logique RSE. Les fournisseurs ont quant à eux compris qu’ils devaient aller dans ce sens tant pour des raisons éthiques qu’économiques. Soit en suivant le mouvement, soit au contraire en l’impulsant.

Comment les entreprises parviennent-elles à concilier voyage d’affaires et voyage éco-responsable ? De quelle façon les acteurs de l’industrie touristique réussiront-ils à transformer un tourisme de masse en voyage durable ? Si des éléments de réponse s’additionnent, la question reste toutefois entière.

Le voyage durable : un devoir moral fort déstabilisant

Est-il besoin de rappeler que l’industrie du tourisme était déjà à l’origine de 5 % de l’émission de gaz à effet de serre en 2014, entre 2005 et 2035, l’industrie aura connue une augmentation de 130 % de ses émissions. Dans le cadre d’une démarche globale de protection de la planète, le voyage ne fait par conséquent pas exception à la règle et doit lui aussi revêtir une dimension pérenne. L’aspect environnemental n’est toutefois qu’un pan de la question de la durabilité. Les considérations économiques et sociales ne doivent en effet pas être écartées.

Alors que les projets de voyages éco-responsables n’ont pas attendu la pandémie pour fleurir aux quatre coins du monde, la prise de conscience de notre incapacité à contrôler tous les pans de notre existence a souligné l’importance du sens que l’on donne à nos actions. Voyager, oui, mais pourquoi, dans quel but, de quelle façon ? Tandis que le tourisme bashing gagnait déjà en puissance avant la crise sanitaire, le voyage responsable s’impose plus que jamais aujourd’hui dans l’esprit des touristes et des collaborateurs.

Pour les fournisseurs comme pour les entreprises, ce phénomène pose question. Ils ne remettent pas en cause la pertinence de cette évolution, mais s’interrogent. Les fournisseurs sur leur capacité à relever le défi de la durabilité, les entreprises sur les moyens dont elles disposent.

Voyager responsable : un impératif plus qu’une tendance pour les entreprises

Pour les entreprises, l’appel au voyage responsable vient à la fois d’en bas et d’en haut. Principaux intéressés et premiers ambassadeurs du voyage durable, les collaborateurs sont en attente de mutations.

Les États se sont quant à eux engagés à faire évoluer les mentalités et les comportements. Les entreprises participent à cette évolution et ont entamé leur conversion au durable. Bien qu’il soit nécessaire, ce changement n’en est pas moins complexe. L’orientation est claire : intégrer les principes du développement durable dans le fonctionnement de l’entreprise. Le cadre est donné : les actions de l’entreprise doivent s’inscrire dans les contours de la politique RSE. Reste – doux euphémisme – à trouver les moyens et les leviers.

Qu’il s’agisse de déplacements professionnels, de voyages incentives ou de séminaires, les travels managers peuvent se tourner vers le même type de solutions pour organiser un voyage d’affaires durable :

● établissements éco-labellisés ;
● activités de valorisation du territoire, de l’environnement et du patrimoine ;
● restauration à base de produits de saison et régionaux ;
● fournitures recyclées ou recyclables ;
● moyens de transport durables (train, bus, covoiturage) ou mise en place de programmes de compensation volontaire des émissions de gaz à effet de serre.

Alors que l’évolution vers un voyage d’affaires durable semble satisfaire la majorité des collaborateurs, certains se montrent plus récalcitrants ou mal informés. Les entreprises doivent alors faire preuve de pédagogie pour impliquer les salariés dans ces changements. Réponse intéressante, l’AFTM a créé le concept de Responsabilité Sociétale du Voyageur. Il vise à transposer les principes de la RSE aux voyageurs d’affaires, dans le but de favoriser les bonnes pratiques.

Un défi payant pour les fournisseurs

Quand l’hôtellerie se fait durable

Si voyager responsable est une nécessité pour les entreprises et un nouveau credo pour les voyageurs, il représente un défi colossal pour les acteurs de l’industrie du tourisme.

Prenons l’exemple du secteur hôtelier et du volet environnemental du développement durable. Pour être en adéquation avec les attendus de l’accord de Paris sur le climat, les établissements devront réduire de 90 % par chambre et par année leurs émissions de gaz à effet de serre d’ici 2050. Les chiffres de l’International Tourism Partnership ont de quoi faire pâlir les indépendants comme les franchisés.

Comment parvenir à une décarbonisation complète de l’hôtellerie d’ici 2050 ? Les moyens sont connus :

● réduction des déchets alimentaires ;
● fonctionnement économe en eau ;
● suppression du plastique ;
● économies d’énergie ;
● suppression du support papier ;
● réalisation de constructions durables.

Les réussites sont néanmoins nombreuses. Les hôtels certifiés (Clef Vertecritères GSTCGreen Star, etc.) se multiplient, laissant augurer un avenir moins noir qu’il n’a pu être dépeint. Le changement sera long pour certains, plus naturel pour d’autres, mais il est bien en marche.

Un choix éthique, mais aussi commercial

Que les fournisseurs se mettent au vert est indispensable sur le plan éthique. La démarche est par ailleurs stratégique d’un point de vue marketing. Le voyage responsable est plus qu’une tendance pour le voyageur. Les Millenials comme la Génération Z, les touristes comme les voyageurs d’affaires, font du voyage durable un mode de pensée et une priorité.

Puisque les voyageurs aspirent désormais à voyager autrement, les fournisseurs doivent répondre et même anticiper cette demande. Si le défi du voyage responsable est colossal, il est néanmoins vital pour la santé économique des établissements hôteliers, des compagnies aériennes et de chaque acteur du secteur. Les efforts réalisés par les fournisseurs devraient par conséquent se révéler payants sur le long terme.

Quel que soit l’angle sous lequel le voyage responsable est envisagé, il se présente à la fois comme un devoir et un défi. Les acteurs du tourisme ont déjà prouvé par le passé leur grande capacité d’adaptation. Ils le feront une nouvelle fois !